Fonctionnement

Les restructurations : le rôle du CSE et des Organisations Syndicales (Atlantes Avocats)

Par Agnès Redon | Le | Prérogatives

En cas de restructuration, l’activité partielle de longue durée et l’accord de performance collective sont deux mécanismes qui permettent de sauvegarder l’emploi dans une entreprise. A l’inverse, la rupture conventionnelle collective et le plan de sauvegarde de l’emploi visent à licencier des salariés. A l’occasion d’une conférence au salon Eluceo du 2 novembre 2021, le cabinet Atlantes Avocats fait le point sur le rôle du CSE et des organisations syndicales dans ce contexte.

Les restructurations : le rôle du CSE et des Organisations Syndicales (Atlantes Avocats)
Les restructurations : le rôle du CSE et des Organisations Syndicales (Atlantes Avocats)

D’après l’article L2312-8 du Code du travail, l’employeur doit consulter le CSE sur la marche générale de l’entreprise, notamment s’agissant des situations suivantes :

  • La restructuration et la compression des effectifs (article L2312-39) ;
  • Le licenciement collectif pour motif économique (article L2312-40) ;
  • Des procédures de sauvegarde, de redressement et de liquidation judiciaire (article L2312-53) etc. 

Les dispositifs négociés permettant de « préserver l’emploi »

L’activité partielle de longue durée (APLD) et l’accord de performance collective constituent 2 mécanismes auxquels l’employeur peut avoir recours lorsqu’il vise à maintenir les effectifs dans son entreprise.

  • L’activité partielle de longue durée

L’activité partielle de longue durée s’impose aux salariés qui voient leur durée du travail réduite. La législation prévoit que l’employeur indemnise le salarié de manière à compenser la perte de revenus liée à la baisse d’activité.

« L’intérêt pour l’employeur dans ce cas est double : il ne compense pas à 100 % et bénéficie d’une aide de l’Etat qui va venir lui rembourser en partie les sommes versées ». L’activité partielle de longue durée se situe dans la perspective d’une reprise d’activité avec un besoin de conserver les compétences dans l’entreprise plutôt que de procéder à des licenciements. L’APLD doit être négociée avec les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise. S’il existe un accord de branche d’APLD dans l’entreprise, l’employeur n’est pas tenu de négocier avec les organisations syndicales. Il peut toutefois le faire et cet accord d’entreprise va primer sur l’accord de branche.

. L’employeur doit justifier de l’intérêt du recours à l’APLD (le préambule de l’accord devant présenter, un diagnostic sur la situation économique et les perspectives d’activité)  ce qui constitue un levier de négociation pour les organisations syndicales.

Lorsque l’employeur met directement en place l’APLD en application de l’accord de branche, il doit au préalable consulter le CSE. Le levier de négociation pour le CSE dans ce cas est qu’il va rendre un avis transmis à l’administration. Le recours de l’APLD sera homologué ou non par la DREETS (Directions régionales de l'économie, de l’emploi, du travail et des solidarités).

« Il est recommandé aux élus ou aux délégués syndicaux de prendre un rendez-vous avec la DREETS. Vous exposerez la situation à la personne qui représente l’Etat qui vous donnera des éléments d’analyse sur votre marge de manœuvre ». 

Concernant l’APLD, « l’employeur doit prendre des engagements sur l’emploi et établir un diagnostic pour montrer que dans un certain nombre de mois, l’emploi va revenir, que les efforts fournis par les salariés ne sont pas vains ». En effet, malgré la compensation, il s’agit pour les salariés d’une perte de la partie de leur rémunération. Les élus doivent identifier combien de salariés vont subir l’APLD et les engagements pris par l’employeur en termes d’emploi.

  • L’accord de performance collective

Là encore, l’employeur doit entamer des négociations avec les organisations syndicales majoritaires afin d’obtenir leur accord sur son projet. Le salarié a la possibilité juridique de refuser le changement de son contrat ; mais en cas de refus il peut être licencié sans bénéficier de la législation protectrice en matière de licenciement pour motif économique. L’employeur n’aura par exemple pas l’obligation de lui faire bénéficier d’un congé de reclassement. Comme l’APLD, l’accord de performance collective vise à éviter les licenciements en réduisant la durée du travail et/ou la rémunération.

Dans un accord de performance collective, le CSE n’est pas consulté. « Cependant, si cet accord induit une réorganisation du travail, notamment en termes de santé et de sécurité, la compétence du CSE est requise, non pas sur le contenu de l’accord mais sur sa mise en œuvre ».

Les dispositifs négociés ayant un impact sur l’emploi

La rupture conventionnelle collective (RCC) et le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) sont 2 autres mécanismes auxquels l’employeur peut avoir recours lorsqu’il vise à réduire les effectifs. Il s’agit alors pour les organisations syndicales de négocier les conditions de départ et de mesurer l’impact des suppressions de postes sur les conditions de travail des salariés restant.  

  • La rupture conventionnelle collective (RCC)

L’entreprise doit négocier un accord avec les organisations syndicales excluant tout départ contraint. Les élus du CSE ne sont a priori pas consultés sur le projet d’accord mais sur les conséquences de la mise en œuvre de ce projet des salariés qui restent. Dans le cadre de la RCC, l’employeur renonce à prononcer des licenciements pour motif économique sur la population visée par l’accord. Il ne peut  a priori pas non plus choisir qui va partir, « ce qui induit souvent du point de vue de l’employeur que la RCC n’est pas adaptée aux entreprises à effectifs réduits ».

  • Le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE)

« le PSE reste l’outil, qui malgré les nouveautés législatives, est encore largement utilisé par les directions pour mettre en œuvre les restructurations. Il a mauvaise presse du point de vue de la direction car notamment elle doit justifier (éventuellement devant les prud’hommes en cas de contentieux) de l’existence d’un motif économique valable et qu’elle n’a pas été en mesure de reclasser les salariés. »

Le PSE peut en pratique être décliné de 3 manières :

  • Le PSE exclusivement fondé sur des départs contraints, lorsque l’employeur choisit unilatéralement qui doit partir. Mais ce choix est très encadré par des critères et la détermination des salariés concernés par les suppressions de postes (définition des catégories professionnelles)  ;
  • Un PSE avec des départs volontaires. Si l’objectif cible de l’employeur n’est pas atteint, il peut choisir qui doit partir dans un second temps ;
  • Le plan de départ autonome. Dans ce cadre, il y a « l’engagement » de ne pas procéder à des licenciements si le nombre de départs volontaire n’atteint pas l’objectif de suppression de postes.

L’employeur doit intégrer des mesures d’accompagnement susceptibles de permettre de manière efficace le reclassement interne ou externe des salariés. Puisque la DREETS analyse dans ce cadre la qualité du projet notamment au regard de l’avis rendu par le CSE, les leviers de négociation peuvent être ici les plus importants ».