Un CSEE peut produire des témoignages anonymisés afin de justifier son expertise pour risque grave
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Un Comité social économique d’établissement (CSEE) peut justifier sa décision de recourir à une expertise pour risque grave en produisant des témoignages anonymisés, corroborés par d’autres éléments de preuve, juge la Cour de cassation dans un arrêt du 11 décembre 2024.

Le contexte
Un CSEE décide de recourir à une expertise pour risque grave sur le fondement de témoignages anonymisés, le 24 novembre 2022. L’employeur saisit le Tribunal afin notamment de contester ces témoignages.
Le Tribunal fait droit à sa demande, constatant que les témoignages ne permettent pas à l’employeur de vérifier s’ils émanent de salariés exerçant les fonctions de chargé d’affaire ou de salariés faisant partie de ceux à l’encontre desquels une procédure disciplinaire a été conduite. En outre, les témoignages n’ont pas été communiqués dans leur intégralité à l’employeur. Le Tribunal juge donc que le juge ne peut pas fonder sa décision sur des pièces qui n’ont pas pu être contradictoirement débattues. Les témoignages sont jugés irrecevables et écartés des débats.
La Cour de cassation censure l’ordonnance, rappelant que le juge ne peut pas fonder sa décision uniquement sur des témoignages anonymes. En revanche, il peut prendre en considération des témoignages anonymisés, c’est-à-dire rendus anonymes a posteriori afin de protéger leurs auteurs mais dont l’identité est connue de la partie qui les produit. Le juge doit vérifier si ces témoignages sont corroborés par d’autres éléments permettant d’en analyser la crédibilité et la pertinence. La Cour constate que le CSEE a produit des témoignages, anonymisés afin de protéger les salariés d’éventuelles représailles. Ces témoignages sont étayés par d’autres pièces. La Cour juge donc que le Tribunal aurait dû examiner la valeur et la portée de ces témoignages, au regard des autres pièces produites par le CSEE. L’affaire est renvoyée devant le Tribunal.
Les modalités de recours à l’expertise au CSE
Pour les accompagner dans leurs missions, les membres du CSE peuvent faire appel à un expert pour leur comptabilité ou pour la santé, la sécurité et les conditions de travail par exemple. Dans le cadre de l’information consultation, il s’agit pour le CSE d’avoir un avis éclairé par l’expertise.
La demande d’expertise s’effectue par le vote portant sur :
- La motivation de l’expertise ;
- Le choix de l’expert
À compter de la désignation de l’expert par le CSE, les membres du comité établissent au besoin et notifient à l’employeur un cahier des charges. L’expert notifie à l’employeur le coût prévisionnel, l’étendue et la durée d’expertise, dans un délai fixé par décret en Conseil d’Etat (article L2315-81-1 du Code du travail).
L’expert demande à l’employeur, au plus tard dans les 3 jours de sa désignation, toutes les informations complémentaires qu’il juge nécessaires à la réalisation de sa mission. L’employeur répond à cette demande dans les cinq jours (article R2315-45 du Code du travail).
L’expert notifie ensuite à l’employeur le coût prévisionnel, l’étendue et la durée d’expertise dans un délai de 10 jours à compter de sa désignation (article R2315-46 du Code du travail).
Les experts ont libre accès dans l’entreprise pour les besoins de leur mission (article L2315-82 à L2315-84 du Code du travail) sont tenus aux obligations de secret et de discrétion. L’employeur leur fournit les informations nécessaires à l’exercice de leur mission.