Lanceur d’alerte : le licenciement n’est nul que si les faits dénoncés sont des délits ou des crimes
Le | Jurisprudence des salariés
Le licenciement d’un salarié, ayant dénoncé des faits, n’est nul que si les faits dénoncés sont susceptibles d’être constitutifs d’un délit ou d’un crime, selon la Cour de cassation dans un arrêt du 1er juin 2023.
Le contexte
- 6 décembre 2014 : un salarié est embauché en qualité de directeur d’exploitation.
- 27 décembre 2017 : il adresse un courrier au président de la société le pour manifester son désaccord avec la mise en place d’une carte de fidélité.
- 5 mars 2018 : il est licencié pour faute grave et insuffisance professionnelle et saisit le CPH afin de contester son licenciement.
La Cour fait droit à sa demande, constatant que le salarié dénonce dans son courrier la légalité et la régularité de la procédure de mise en place de la carte de fidélité. Il énonce également que cette opération supprime indûment du chiffre d’affaires.
La lettre de licenciement reproche au salarié la dénonciation faite dans son courrier. Elle le qualifie de stratagème sous forme de menace et de chantage pour obtenir une rupture conventionnelle.
La Cour juge que le licenciement est consécutif, au moins pour partie, à une dénonciation d’un fait pouvant recevoir une qualification pénale. Le licenciement est donc nul.
- La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel, rappelant qu’aucun salarié ne peut être licencié pour avoir relaté, de bonne foi, des faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions ou pour avoir signalé une alerte.
- La Cour de cassation constate que la Cour d’appel ne s’est pas prononcée sur le caractère délictueux ou criminel des faits dénoncés par le salarié. Elle juge donc que l’affaire doit être renvoyée devant la Cour d’appel sur cette question.
La protection des lanceurs d’alerte
La protection des lanceurs d’alerte est notamment définie dans l’article L.1132-3-3 nouveau du Code du travail.
Ainsi, aucune personne ayant témoigné, de bonne foi, de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont elle a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions ou ayant relaté de tels faits, ne peut faire l’objet des mesures suivantes :
- Etre écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise ;
- Etre sanctionnée ;
- Etre licenciée ;
- Faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, d’horaires de travail, d’évaluation de la performance, de mutation ou de renouvellement de contrat.
L’alerte du CSE
En cas de situation dangereuse pour les salariés ou pour la santé publique et l’environnement, le CSE en informe l’employeur. Après cette étape informative par écrit dans le registre spécial du DGI (Dangers graves et imminents) (articles L2312-60 et L4231-1 du Code du travail), une enquête est menée dans l’entreprise.
Les membres du CSE peuvent alors se déplacer et mener des entretiens avec les salariés. Pour exercer leur mission, les membres du CSE doivent utiliser leurs heures de délégation.
Une fois que le danger est identifié, l’employeur prend les mesures et donne les instructions nécessaires pour permettre aux travailleurs d’arrêter leur activité et de se mettre en sécurité en quittant immédiatement le lieu de travail (article L4132-5 du Code du travail).
En cas de désaccord entre l’employeur et le CSE, une réunion exceptionnelle sera organisée dans un délai maximum de 24 heures. Il est possible de saisir :
- L’inspection du travail ;
- Le préfet ;
- La justice.
Si un accident survient dans le cadre d’une procédure d’alerte, les juges pourront retenir le manquement à l’obligation de sécurité et une faute inexcusable de sa part.