Droits des salariés

Protection des lanceurs d’alerte : les conseils du Défenseur des droits

Par Agnès Redon | Le | Qvct et santé

De quelle manière les lanceurs d’alerte peuvent-ils se protéger, notamment de représailles ? Le guide publié par le Défenseur des droits en mars 2023 oriente les lanceurs d’alerte dans leurs démarches pour bénéficier d’un statut et du régime protecteur qui lui est rattaché.

Mars 2023 : publication du guide des lanceurs d’alerte par le Défenseur des droits - © D.R.
Mars 2023 : publication du guide des lanceurs d’alerte par le Défenseur des droits - © D.R.

Lancer une alerte est un droit

« Le fait de signaler ou divulguer des faits répréhensibles (crimes, délits…) ou contraires à l’intérêt général (comportements potentiellement dangereux pour la population) peut faire de vous un lanceur d’alerte », indique le guide.

Lancer une alerte est un droit. Le législateur protège ceux qui font usage de ce droit en :

  • Interdisant toute forme de représailles à l’encontre des lanceurs d’alerte ;
  • Donnant à ces derniers les moyens de se défendre s’ils en sont victimes.

Les lanceurs d’alerte sont ainsi protégés contre les mesures négatives prises à leur encontre en raison de leur alerte, comme une mesure de licenciement, une sanction, la perte d’une subvention, ou encore une « procédure bâillon ».

Une « procédure bâillon » est une action en justice, par exemple une poursuite pour diffamation ou atteinte à la réputation, qui vise à intimider le lanceur d’alerte.

  • Plusieurs textes protègent les lanceurs d’alerte. Le principal est la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite loi Sapin II.

Cette loi a été sensiblement modifiée par la loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte, laquelle assouplit la définition du lanceur d’alerte et renforce les protections accordées à ce dernier.

Un signalement interne ou externe 

Pour pouvoir être protégé en tant que lanceur d’alerte, « il vous faut suivre certaines règles de procédure », conseille le guide.

En effet, la loi prévoit deux manières de lancer une alerte, en procédant à :

  • Un signalement interne qui consiste à « s’adresser à une personne à l’intérieur de votre structure professionnelle ou celle à laquelle vous avez appartenu ou auprès de laquelle vous vous êtes porté candidat ». Le signalement interne n’est possible que si « vous avez obtenu les informations liées à l’alerte dans le cadre de vos activités professionnelles, que ce soit comme salarié ou agent public ». Le guide précise : « Il n’est jamais obligatoire. Un tel signalement peut être envisagé si vous pensez que votre alerte sera traitée de manière confidentielle et impartiale au sein de l’entité qui vous emploie. »
  • Un signalement externe qui « consiste à porter l’alerte à la connaissance d’une institution désignée par les textes ».

Il est possible d’effectuer un signalement externe en parallèle d’un signalement interne. Cependant, la divulgation publique, par exemple auprès des médias, ne peut être envisagée qu’après un signalement externe.

Que faire en cas de représailles ?

La loi interdit à toute personne de prendre à votre encontre des décisions défavorables en lien avec l’alerte.

La responsabilité des auteurs de discriminations à l’égard des lanceurs d’alerte est pénale (article 225-1 du Code pénal).

La victime de mesures de représailles peut :

  • Solliciter l’annulation de ces mesures devant le juge compétent (s’agissant, par exemple, de représailles émanant d’un employeur : le tribunal administratif si vous êtes un agent public, le conseil des prud’hommes si vous êtes un salarié de droit privé) ;
  • Etre indemnisé des préjudices résultants de ces représailles, par exemple, la perte de la rémunération tirée d’un emploi en cas de licenciement ;
  • Se prévaloir du statut de lanceur d’alerte pour se défendre contre des procédures « bâillon » (article 13 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016)
  • Saisir le conseil des prud’hommes d’un référé prud’homal si vous êtes salarié et que votre employeur a rompu votre contrat de travail à la suite de votre alerte. Une telle procédure impose au conseil des prud’hommes de se prononcer dans de brefs délais sur la légalité de la décision.

« Si vous êtes salarié, le conseil des prud’hommes peut obliger votre employeur à abonder votre compte personnel de formation. Cette mesure peut être décidée en complément d’une autre sanction. »

La liste non limitative des représailles interdites est à consulter dans l’article 10-1 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.