Droits des salariés

Participation : les salariés expatriés ne peuvent être exclus du bénéfice de la participation

Par Agnès Redon | Le | Jurisprudence des salariés

La clause excluant les salariés expatriés du bénéfice de la participation et de l’intéressement est illicite, juge la Cour de cassation dans un arrêt du 15 mai 2024.

Participation et intéressement : exclure les salariés expatriés des dispositifs est illicite - © D.R.
Participation et intéressement : exclure les salariés expatriés des dispositifs est illicite - © D.R.

Le contexte

Un salarié est embauché le 17 septembre 1992 en qualité de responsable export et est expatrié à l’étranger à compter du 21 février 1997. Il est licencié pour faute grave le 18 mai 2017. Il saisit le CPH afin de demander, notamment, le versement de son intéressement et de sa participation.

  • La cour d’appel rejette sa demande, constatant que le salarié a été envoyé à l’étranger.
  • Il a cessé d’appartenir au personnel de l’entreprise française pour devenir salarié de l’entreprise d’accueil. Il ne peut plus se prévaloir de son contrat de travail initial ;
  • Il perd toute vocation aux dispositifs d’épargne salariale dans son entreprise d’origine.

La cour juge donc que le salarié n’a pas droit à la participation ou à l’intéressement pour la période d’expatriation.

La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel, rappelant l’article L.3342-1 du Code du travail, selon lequel tous les salariés d’une entreprise, compris dans le champ des accords d’intéressement et de participation ou des plans d’épargne salariale, bénéficient de leurs dispositions.

Elle constate que les accords d’intéressement et de participation de l’entreprise contiennent des clauses d’exclusion pour les salariés détachés à l’étranger ou expatriés.

La Cour juge néanmoins que tous les salariés doivent avoir la possibilité de bénéficier de la répartition de l’entreprise. Il importe peu qu’ils n’exécutent pas leur activité en France ou qu’ils n’y soient pas rémunérés. Les clauses d’exclusion doivent donc être réputées non écrites.

La participation : un rappel des règles d’application

La participation est obligatoire dans les entreprises dont l’effectif est de 50 salariés ou plus. Le seuil de 50 salariés doit avoir été atteint au cours des 5 dernières années (moyenne des 12 mois de chaque année).

En deçà, elle peut être mise en place de façon volontaire par l’entreprise.

Elle est calculée selon une formule légale : RSP = ½ (S/VA) x (BF - 5 % CP)

Avec :

  • S = Salaire ;
  • VA = Valeur ajoutée ;
  • BF = Bénéfice fiscal ;
  • CP = Capitaux propres.

Un accord collectif d’entreprise peut prévoir une formule différente (formule dérogatoire) :

  • Le montant issu de cet accord doit au moins être égal à celui calculé selon la formule légale ;
  • La possibilité d’accord générant un montant inférieur à la formule légale est prévue par la loi, mais uniquement pour les entreprises de moins de 50 salariés ;
  • La somme est bloquée pendant 5 ans au minimum (8 ans en l’absence d’accord), sauf mise en œuvre de l’un des cas de déblocage anticipé prévus par la loi.

Un accord d’entreprise peut notamment décider :

Des modalités de répartition de la réserve de participation entre les salariés (répartition« par tête », répartition en proportion de la rémunération)

  • D’une affection des sommes sur un plan d’épargne salariale ;
  • D’appliquer un accord de branche pour les entreprises de moins de 50 salariés.

La participation est exonérée de charges sociales, est assujettie à la CSG/CRDS, exonérée d’impôt sur le revenu si le montant est placé sur un dispositif d’épargne salariale et bloqué cinq ans (imposé en cas de versement immédiat).

  • Un forfait social de 20 % est appliqué pour les entreprises de plus de 250 salariés ;
  • La participation versée aux salariés ne peut excéder 3 fois le plafond de la Sécurité sociale ;
  • La participation ne peut pas se substituer aux éléments de rémunération, à des augmentations de rémunération ou à des primes prévues par accord collectif ou usage.

L’intéressement : un rappel des règles d’application

Un accord d’intéressement est à la fois un moyen de partager la valeur créée par l’entreprise et un moyen pour le dirigeant et les salariés de partager les objectifs que se fixe l’entreprise.

Les critères peuvent :

  • Mettre l’accent sur la profitabilité, la croissance du chiffre d’affaires, la qualité de service…
  • Être des cibles en valeur absolue, ou des objectifs de progression.

Il est recommandé de retenir des indicateurs simples et facilement mesurables, en particulier dans les entreprises de petite taille : s’appuyer sur les outils de suivi comptable d’une PME.

Le régime de faveur social et fiscal est équivalent à celui de la participation.

Comme pour la participation, l’intéressement ne peut en aucun cas se substituer aux éléments de rémunération ni à des augmentations de rémunération ou à des primes prévues par accord collectif ou usage.