Droits des salariés

QVCT : le dialogue social au service de la qualité du travail (focus RDS)

Par Agnès Redon | Le | Qvct et santé

Quel rôle peut jouer le dialogue social pour soutenir la qualité du travail ? Le webinaire de l’association Réalités du Dialogue Social (RDS) le 11 octobre 2023 a permis de faire le point sur les résultats de l'étude menée sur le sujet du travail et de la QVCT.

QVCT (ex QVT) : Quel rôle peut jouer le dialogue social pour soutenir la qualité du travail ?  - © D.R.
QVCT (ex QVT) : Quel rôle peut jouer le dialogue social pour soutenir la qualité du travail ? - © D.R.

L’objet de l'étude RDS

En juin 2022, l’Association RDS lance un nouveau groupe de réflexion sur le sens au travail et la façon dont les partenaires sociaux s’emparent de cet enjeu, mis en lumière en sortie de pandémie. C’est dans ce cadre qu’une trentaine d’entretiens ont été réalisés avec :

• Des élus et représentants de salariés ;

• Des dirigeants ;

• Des directions RH ;

• Des relations sociales de structures de toute taille et tout secteur.

Cette enquête est complétée d’une analyse d’accords QVCT.

L’objet de l’étude, parti d’une perte sens au travail, a souhaité s’interroger sur la notion de qualité du travail et sa place dans les accords QVCT :

• Eclairer le caractère polymorphe de la qualité du travail ;

• Mettre en valeur une série de cas qui pourrait inspirer les entreprises et montrerait que le dialogue social a un rôle à jouer, dans une politique un peu ambitieuse, sur ce sujet ;

• Appuyer les entreprises dans la mise en place de politiques structurées (et pérennes ?) sur la qualité du travail afin de dépasser les logiques de réactions au coup par coup.

Les résultats de l'étude 

Marianne Salvetat Bernard chef de projet au sein de RDS, présente les résultats de l'étude :

« À travers les entretiens menés pour l'étude, j’ai ressenti une grande fierté des personnes à faire leur travail. Ces interviews paritaires révèlent les approches contrastées que suscite la notion de “qualité du travail”, ainsi que les freins matériels et conjoncturels, à l’heure où parler du travail s’affirme pourtant comme une nécessité. »

Elle constate par ailleurs que :

  • Plusieurs représentations de la qualité du travail cohabitent 

« Une approche par le travail réel du côté des salariés, tandis que le contrôle du résultat se trouve du côté du manager. En effet, la conformité est une façon pour l’employeur de mesurer la qualité du travail », souligne Marianne Salvetat Bernard.

  • La pression économique est un facteur de qualité empêchée partagé par les interviewés

« Les exigences de performance économique complexifient les relations sociales. Ce point est aussi bien partagé par les employeurs que par les salariés. »

  • Le besoin de reconnaissance (faire un « beau travail ») et de discussion sur le travail

« Le besoin d'écoute et de considération est demandé par toutes les parties interviewées. »

Pour Laurent Tertrais, secrétaire national CFDT, la reconnaissance au travail est particulièrement importante.

« Nous sommes peu nombreux à fabriquer un objet, ce qui rend notre travail abstrait, immatériel. L’attrait porté à l’artisanat, c’est le fait de posséder ce que l’on fait. C’est pourquoi le débat sur la qualité du travail et ses conditions de réalisation prend tout son sens. »

Les incontournables de la qualité du travail

Ce qui ressort de ces entretiens, d’après Marianne Salvetat Bernard, c’est :

  • L’importance du collectif, le rôle de l’équipe, et l'élaboration collective du contenu du travail ;
  • Le constat d’un management en souffrance, notamment à cause de l’impact du turnover et d’une valorisation en perte de vitesse.

Concernant les conditions de travail des managers, pour Laurent Tertrais, « il y a une surcharge de travail du management. Il faut donc remettre le travail dans une bonne temporalité et une bonne hiérarchie des prescriptions. Nous avons besoin de retrouver un management qui fonctionne sur de l’activité réelle, davantage que des encadrants qui passent leur temps à regarder les chiffres du livrable, des objectifs de vente. »

  • L’attractivité et la valorisation des métiers  : il est question d'éviter la perte de savoir faire, notamment par la rédaction de fiches de poste et une réflexion sur le parcours professionnel.

Les clés du dialogue social

Selon Marianne Salvetat Bernard, pour avoir un espace de dialogue social, il faut notamment :

« Une entrée par le DUERP avec les IRP, des outils de prévention, un échange sur le travail avec les représentants de proximité, une consultation du CSE puis une mobilisation dans la négociation collective.

Or les entretiens de l’enquête révèlent un dialogue social dégradé, des difficultés de communication entre les instances et avec les salariés, une faible consultation ou négociation sur enjeux de la qualité du travail et une perte de proximité », souligne-t-elle. 

« Une des clés d’un bon dialogue social, ce sont les initiatives de dialogue QVCT » avec notamment : 

  • La négociation d’espaces de discussion sur le travail ;
  • Un entretien annuel innovant qui va intégrer les sujets sur les conditions de travail, la pénibilité etc.
  • Observer et comprendre le travail réel
  • Reconnaître le travail « bien fait » et donner de la latitude décisionnelle ;
  • Valoriser le métier (identité professionnelle), anticiper ses évolutions et l’apprentissage ;
  • Aborder la question de l’organisation dans toutes ses composantes (organisation du travail, relations sociales, relations client…) ;
  • Appréhender les exigences de performance sur le long terme ;
  • Savoir débattre sur le travail sans se battre ;
  • Disposer d’un lieu et de temps pour discuter du travail ;
  • Elargir le droit d’expression au pouvoir d’agir sur les situations de travail ;
  • Organiser une coopération entre la direction, les salariés et les managers en les accompagnant avec des outils d’intelligence collective ;
  • Redonner de l’élan au collectif.

Ainsi, plus concrètement, s’appuyer sur le dialogue social, c’est :

  • Négocier un accord, à partir d’un diagnostic partagé, en intégrant un volet « qualité du travail » et des indicateurs QVCT ; 
  • Prévoir les modalités d’accès des IRP au terrain (dialogue social de proximité) et des canaux pour faire coïncider CSE, CCSCT et négociation collective ;
  • Déterminer les modalités d’articulation avec le dialogue professionnel ;
  • Embarquer les membres du CSE sur la qualité du travail notamment avec le DUERP en dépassant sa composante sécuritaire ;
  • Au-delà du rôle consultatif, impliquer les instances dans la co-construction des outils d’expression sur le travail (questionnaire, guide d’entretien annuel…) ;
  • Sensibiliser les représentants, employeurs comme salariés, à la prévention des risques professionnels, notamment par des formations communes.

Concepts clés et définitions : #CSE ou Comité Social et Économique , #QVCT (ex QVT) ou Qualité de Vie et des Conditions de Travail