Droits des salariés

Nestlé : « L’annonce de la suppression de 16 000 postes constitue un véritable séisme » (C. Kauffmann, CFDT)


« Cette annonce constitue un véritable séisme pour l’emploi. La suppression de 16 000 postes est loin d’être insignifiante. 12 000 de ces postes concernent des employés de bureau et cela représente une proportion considérable. En effet, 16 000 suppressions sur l’effectif mondial de Nestlé équivalent à environ 6 % des effectifs. Si l’on se concentre uniquement sur les employés de bureau, cela représente presque 15 % des effectifs, ce qui est extrêmement significatif », déclare Christophe Kauffmann, secrétaire fédéral CFDT chez Nestlé.

Il s’exprime au sujet de l’annonce de Philipp Navratil, directeur général de Nestlé, le 16/10/2025, et qui prévoit la suppression de 16 000 postes au niveau mondial d’ici 2027. Nestlé emploie 277 000 personnes dans le monde.

Nestlé : « L’annonce de la suppression de 16 000 postes constitue un véritable séisme » (C. Kauffmann, CFDT)
Nestlé : « L’annonce de la suppression de 16 000 postes constitue un véritable séisme » (C. Kauffmann, CFDT)

Comment réagissez-vous à l’annonce de la suppression de 16 000 postes au niveau mondial ?

Cette annonce a été une grande surprise, d’autant plus qu’aucune annonce préalable n’a été faite. Tout le monde a découvert l’information à 7 heures, le matin, y compris les chefs de marché qui sont les responsables des activités de Nestlé dans chaque pays.

Après l’annonce, le cours de l’action Nestlé a augmenté de 8 %

Ce secret a été justifié par la nécessité de respecter les règles de confidentialité pour éviter tout risque de délit d’initié. En effet, juste après l’annonce, le cours de l’action Nestlé a augmenté de 8 %. Si certaines personnes avaient été prévenues et avaient acheté des actions en sachant qu’elles allaient monter, cela aurait constitué un délit d’initié. C’est sous ce prétexte qu’ils ont affirmé n’avoir informé personne.

Nous avons tenu une réunion le 16/10/2025 avec les deux directeurs des ressources humaines de France : l’un responsable du DGRH et l’autre en charge des relations sociales du groupe. Cette réunion, destinée à tous les coordinateurs syndicaux du groupe, avait un caractère formel, car il est de leur devoir de nous informer, et nous aurions de toute façon exigé des explications. Toutefois, les informations fournies étaient limitées.

Cette annonce constitue un véritable séisme pour l’emploi. La suppression de 16 000 postes est loin d’être insignifiante. 12 000 de ces postes concernent des employés de bureau et cela représente une proportion considérable. En effet, 16 000 suppressions sur l’effectif mondial de Nestlé équivalent à environ 6 % des effectifs. Si l’on se concentre uniquement sur les employés de bureau, cela représente presque 15 % des effectifs, ce qui est extrêmement significatif.

Comment avez-vous appris cette nouvelle ?

Tous les salariés de Nestlé ont reçu un courriel à 7 heures de Philipp Navratil, dans lequel il présentait les résultats trimestriels, comme cela est fait chaque trimestre. Dans cette revue, il a profité de l’occasion pour annoncer que Nestlé devait réviser son modèle, ce qui impliquerait des décisions difficiles, notamment la suppression d’environ 16 000 postes sur deux ans.

Y a-t-il un lien avec le projet de recherche de partenaire de Nestlé Waters Monde ?

Pas directement. Cependant, la séparation envisagée pour le secteur Waters s’inscrit dans un plan global visant à redonner confiance aux actionnaires et à transformer Nestlé. Toutefois, cela n’est pas inclus dans les 16 000 suppressions. Cette information m’a été confirmée.

Avez-vous un calendrier des discussions avec la direction ?

Nous ne disposons pas de calendrier précis. Pour l’instant, il a été indiqué qu’à l’issue de cette annonce, découverte par les ressources humaines le 16/10/2025, des études seront menées à l’échelle mondiale, européenne et nationale. Ces études, visant à identifier les suppressions de postes, seront validées, en tout cas pour la France, par la zone Europe. Une fois validées, elles pourront nous être présentées.

Nous avons simplement repris rendez-vous pour le prochain comité de groupe qui se tiendra le 04/12/2025

Cependant, nous n’avons pas de délai précis, car il s’agit d’un vaste projet. De plus, cela s’étend sur deux ans. Je ne pense pas qu’ils annonceront tout d’un coup. Pour la France, nous avons simplement repris rendez-vous pour le prochain comité de groupe qui se tiendra le 04/12/2025. D’ici là, a priori, ils ne semblent pas avoir prévu de faire des annonces officielles.

Quelles sont vos revendications après cette annonce ?

Nous envisageons de nous réunir de manière intersyndicale en France, car il semble nécessaire de traiter ce dossier collectivement, même si cela ne sera pas simple, car nous n’avons pas tous la même vision des choses.

Il est évident que ces 16 000 personnes jouent un rôle

Pour l’instant, notre revendication principale est de refuser catégoriquement que la transformation du groupe se traduise par des suppressions d’emplois massives. Nous n’acceptons pas ces suppressions sous prétexte de transformer le groupe. Comment peut-on justifier que chez Nestlé, il y ait 16 000 personnes qui ne servent à rien et que l’on puisse les supprimer ? Cela semble impossible. Il est évident que ces personnes jouent un rôle. Chez Nestlé, si l’on ne remplit pas son rôle, on est licencié. La question ne se pose même pas.

Supprimer 16 000 postes d’ici deux ans nécessitera une évaluation pays par pays. Si cela concerne des fermetures d’usines en raison de l’arrêt d’une activité, cela pourrait se faire rapidement. C’est ce que l’on attend d’ailleurs pour Waters en 2026 ; il est probable que 33 000 salariés de Waters dans le monde quittent le groupe pour rejoindre une nouvelle entité qui ne sera pas Nestlé. Cela ne signifie pas que ces 33 000 personnes disparaîtront ou perdront leur emploi. C’est différent. Mais dire que l’on transforme et qu’il y a 16 000 postes actuellement occupés qui ne le seront plus, c’est inacceptable.

Comment réagissent les salariés ?

Tous les coordinateurs syndicaux centraux du groupe ont exprimé que les salariés étaient totalement désorientés. Cette annonce constitue un choc.

Actuellement, il y a déjà de grandes inquiétudes en France

Lorsqu’une annonce de ce type est faite, sans préciser les impacts, chacun dans son poste, son métier et sa fonction se dit que cela pourrait le concerner. Actuellement, il y a déjà de grandes inquiétudes en France, notamment dans les usines Purina, spécialisées dans les aliments pour animaux de compagnie, où il y a des baisses de production significatives. Hier, l’équipe du CSE de l’usine de Marconnel (Pas-de-Calais) a quitté la réunion en signe de protestation, déclarant qu’il est inacceptable d’entendre qu’ils vont encore supprimer des volumes, car cela entraînera inévitablement des suppressions de postes.

Plusieurs secteurs, tels que Nespresso, suscitent également de vives inquiétudes, car nous perdons des clients. La stratégie n’est plus aussi claire qu’elle l’était autrefois. D’ailleurs, cela leur avait été présenté dans le cadre de la consultation sur les orientations stratégiques. Il leur avait été annoncé qu’en 2026, ils envisageaient de supprimer 6 % des effectifs. Ils sont donc moins surpris, car cela leur avait déjà été plus ou moins communiqué.