Droits des salariés

Lanceur d’alerte : la charge de la preuve de la nullité du licenciement dépend de la cause invoquée

Le | Jurisprudence des salariés

Lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement caractérisent une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient au salarié de démontrer que la rupture du contrat de travail constitue une mesure de rétorsion à une plainte pour harcèlement moral ou sexuel, selon un arrêt du 18 octobre 2023 de la Cour de cassation.

Droit des salariés : la charge de la preuve de la nullité du licenciement dépend de la cause invoquée - © D.R.
Droit des salariés : la charge de la preuve de la nullité du licenciement dépend de la cause invoquée - © D.R.

Le contexte

  • Un salarié est embauché le 14 mars 2019 en qualité de cuisinier.
  • Il est licencié pour faute grave le 18 novembre 2019. Il saisit le CPH afin de contester cette procédure, estimant qu’il a été licencié pour avoir dénoncé un harcèlement sexuel.

La Cour d’appel fait droit à sa demande, jugeant que l’engagement de la procédure de licenciement pour faute grave trouve son origine dans la dénonciation, par le salarié, de faits de harcèlement sexuel. L’alerte du salarié a manifestement pesé sur la décision de l’employeur. Celui-ci n’établit pas que la dénonciation a été faite de mauvaise foi. La Cour juge donc que le licenciement est nul.

La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel :

  • en rappelant que, lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement caractérisent une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient au salarié de démontrer que la rupture du contrat de travail constitue une mesure de rétorsion à une plainte pour harcèlement moral ou sexuel. Dans le cas contraire, il appartient à l’employeur de démontrer l’absence de lien entre la dénonciation par le salarié d’agissements de harcèlement et son licenciement.
  • en constatant que la lettre de licenciement ne mentionne pas une dénonciation de faits de harcèlement sexuel.
    • Dans son arrêt du 18 octobre 2023, la Cour de cassation juge donc que la Cour d’appel aurait dû apprécier les faits reprochés au salarié pour déterminer l’existence ou non d’une cause réelle et sérieuse du licenciement et le régime de preuve en découlant.
    • L’affaire est renvoyée devant la Cour d’appel.

La protection des lanceurs d’alerte

La protection des lanceurs d’alerte est notamment définie dans l’article L.1132-3-3 nouveau du Code du travail.

Ainsi, aucune personne ayant témoigné, de bonne foi, de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont elle a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions ou ayant relaté de tels faits, ne peut faire l’objet des mesures suivantes :

  • Etre écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise ;
  • Etre sanctionnée ;
  • Etre licenciée ;
  • Faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, d’horaires de travail, d'évaluation de la performance, de mutation ou de renouvellement de contrat.

L’alerte du CSE

En cas de situation dangereuse pour les salariés ou pour la santé publique et l’environnement, le CSE en informe l’employeur. Après cette étape informative par écrit dans le registre spécial des Dangers graves et imminents (GDI) précisés dans les articles L2312-60 et L4231-1 du Code du travail), une enquête est menée dans l’entreprise.

Les membres du CSE peuvent alors se déplacer et mener des entretiens avec les salariés. Pour exercer leur mission, les membres du CSE doivent utiliser leurs heures de délégation.

Une fois le danger identifié, l’employeur prend les mesures et donne les instructions nécessaires pour permettre aux travailleurs d’arrêter leur activité et de se mettre en sécurité en quittant immédiatement le lieu de travail (article L4132-5 du Code du travail).

En cas de désaccord entre l’employeur et le CSE, une réunion exceptionnelle sera organisée dans un délai maximum de 24 heures. Il est possible de saisir :

  • L’inspection du travail ;
  • Le préfet ;
  • La justice. 

Si un accident survient dans le cadre d’une procédure d’alerte, les juges pourront retenir le manquement à l’obligation de sécurité et une faute inexcusable de sa part.

Concepts clés et définitions : #CSE ou Comité Social et Économique