Droits des salariés

Violences et harcèlement au travail : les 6 leviers d’action du CSE (Groupe Legrand)

Par Agnès Redon | Le | Qvct et santé

Dans le cadre de ses attributions légales, le CSE a un rôle important en matière de prévention du harcèlement moral et des violences sexistes.
Le Groupe Legrand fait le point sur les obligations de l’employeur, les leviers et conseils avisés pour agir en tant qu’élu de CSE.

Fonctionnement du CSE : Les 6 leviers d’action du CSE contre le harcèlement au travail - © D.R.
Fonctionnement du CSE : Les 6 leviers d’action du CSE contre le harcèlement au travail - © D.R.

1/ Activer les prérogatives du CSE

Pour agir contre les violences et harcèlement au travail, il faut activer les prérogatives du CSE, parmi lesquels :

  • Procéder à l’analyse des risques professionnels auxquels peuvent être exposés les travailleurs (article L2312-9 du Code du travail) ;
  • Exercer votre droit d’alerte dès que vous avez connaissance de faits de violence ou de harcèlement (articles L2312-5 et L2312-59 du Code du travail) ;
  • Saisir l’inspection du travail de toute plainte et observation relative à l’application des dispositions légales dont elle est chargée d’assurer le contrôle (article L2312-5 du Code du travail) ;
  • Procéder, à intervalles réguliers, à des inspections en matière de SSCT et à des enquêtes en matière d’arrêts du travail ou de maladies professionnelles (article L2312-13 du Code du travail) ;
  • Susciter toute initiative que vous estimez utile et proposez notamment des actions de prévention du harcèlement moral, du harcèlement sexuel et des agissements sexistes. Le refus de l’employeur est motivé (article L2312-9 du Code du travail).

2/ Appréhender les violences de manière systémique et lutter contre les climats sexistes

Au-delà des victimes, l’enjeu est d’en faire un sujet collectif. Quand il y a des situations individuelles de violences, il faut toujours :

  • Interroger l’environnement et l’organisation du travail ;
  • Sensibiliser le collectif de travail, comme écosystème.

Il s’agit également de lutter contre les climats sexistes. En effet, les actes sexistes quotidiens font persister une tolérance, une zone d’acceptabilité du sexisme. On parle de continuum des violences : entre des manifestations insidieuses, clichés, stéréotypes, blagues et des violences plus graves.

3/ Identifier les facteurs et terreaux fertiles aux violences

Les facteurs et terreaux fertiles aux violences à identifier sont les suivants :

  • Des secteurs et des équipes peu mixtes. En effet, sous un seuil de 30 % de femmes, les risques augmentent ;
  • Des organisations du travail très hiérarchisées, ou à l’inverse, peu hiérarchisées, milieux festifs ;
  • Des postes peu indépendants, autonomes, peu reconnus ;
  • Des métiers avec une forte composante relationnelle, notamment dans les services à la personne ou le monde du spectacle ;
  • Des conditions d’emploi précaires.

Il convient d’adopter des mesures de prévention renforcées dans les cas suivants :

  • Pas ou peu de mixité dans l’équipe de travail ;
  • Pour les apprentis, les stagiaires, les précaires, les salariés sous-traitants ;
  • Lors d’un travail isolé (aides à domiciles, postières, livreuses, femmes de chambres…)
  • Les salariés en contact avec de la clientèle ou des usagers ;
  • Pour les personnes non francophones ;
  • Pour les personnes handicapées.

4/ Mettre en place une procédure-type et un dispositif d’accueil et de signalement

Les étapes de mise en place d’un dispositif d’accueil et de signalement sont les suivantes :

  • Le signalement des faits ;
  • La reconstitution avec le plaignant des faits précis et des éléments de preuve en sa possession ;
  • La saisie de l’employeur, en rappelant que le plaignant peut se faire accompagner de la personne de son choix et le déclenchement d’un droit d’alerte ;
  • Une mesure de protection immédiate du plaignant et des témoins, et l’éloignement du mis en cause ;
  • Une procédure d’enquête par l’employeur conjointe avec les représentants du personnel en cas d’alerte ;
  • Une consultation anonyme du collectif de travail pour mesurer s’il y a d’autres victimes de violences (pas forcément du même mis en cause), ce qui sera un point d’appui pour mettre en place des mesures de prévention collectives ;
  • La conclusion de l’enquête avec une qualification des faits, une sanction de l’agresseur et des mesures de réparation pour le plaignant telles que la prise en charge le cas échéant des frais d’avocat et du suivi psychologique.

5/ Former les managers et les salariés

Une meilleure sensibilisation et une formation adéquate des responsables hiérarchiques et des salariés réduisent la probabilité des cas de survenance de harcèlement et de violence au travail, selon l’Accord national interprofessionnel (ANI) sur le harcèlement et les violences au travail (26 mars 2010, article 4-1).

Ainsi, il est recommandé d’instaurer une obligation de formation et sensibilisation obligatoire et régulière :

  • Des managers lors de la prise de poste et de façon régulière ;
  • Des salariés sur ce qu’est une agression sexuelle, le harcèlement sexuel et le sexisme.

Il est pour cela possible de diffuser à tous les salariés une plaquette rappelant :

  • la loi ;
  • les définitions d’une agression sexuelle, du harcèlement sexuel et du sexisme ;
  • les sanctions encourues et les protections pour la victime ;
  • les dispositions de l’accord et le dispositif de signalement avec les coordonnées des référents contre les violences de l’employeur et du CSE.

6/ Rappeler les interlocuteurs des salariés

Les interlocuteurs des salariés sur le harcèlement et les violences au travail sont les suivants :

  • L’employeur qui a une obligation de prévention ;
  • Le CSE qui peut saisir l’employeur de toute atteinte aux droits des personnes ;
  • Les services de santé au travail dont le rôle est notamment de prononcer une inaptitude permanente ou temporaire et d’établir un certificat médical ;
  • L’inspection du travail qui veille au respect de la règlementation notamment en matière de SSCT et peut réaliser une enquête lorsqu’elle est saisie ;
  • Le conseil des prud’hommes qui peut être saisi en vue de :
    • Contester un licenciement ;
    • Demander une résiliation judiciaire du contrat de travail ;
    • Requalifier une démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
    • Faire cesser les agissements et obtenir réparation du préjudice.
  • Le juge pénal qui peut être saisi pour poursuivre l’auteur du harcèlement ;
  • Le défenseur des droits dont le rôle est de lutter contre les discriminations. Il peut ainsi être saisi si le harcèlement repose sur des critères discriminatoires.

Concepts clés et définitions : #ANI ou accord national interprofessionnel, #CSE ou Comité Social et Économique , #CSSCT (ex CHSCT) ou santé et sécurité au travail