Dialogue social

Réforme de l’assurance chômage : large opposition des syndicats à propos des règles durcies

Par Agnès Redon | Le | Syndicats

Les organisations syndicales CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, UNSA et CFTC s’opposent au projet de décret qui mettra en œuvre la réforme de l’assurance-chômage à partir du 1er février 2023. Tour d’horizon des réactions.

Réforme de l’assurance chômage : large opposition des syndicats à propos des règles durcies - © D.R.
Réforme de l’assurance chômage : large opposition des syndicats à propos des règles durcies - © D.R.

Les règles de contracyclicité du système d’assurance chômage ont été présentées par Olivier Dussopt, ministre du Travail, du Plein emploi et de l’Insertion, le 21 novembre 2022.

Les dispositions sont notamment les suivantes jusqu’au 31 décembre 2023 :

  • La réduction de 25 % de la durée d’indemnisation pour toutes les personnes en fin d’indemnisation et nouvellement inscrites à Pôle emploi à compter du 1er février 2023 ;
  • Un retour aux règles actuelles de calcul de la durée d’indemnisation en cas de retour à une situation dite “défavorable”, c’est-à-dire un retour à un chômage supérieur à 9 % sur un trimestre.

La modulation de la durée d’indemnisation ne s’applique pas :

- aux demandeurs d’emploi résidant en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à la  Réunion, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin,

- aux intermittents du spectacle,

- aux marins-pêcheurs salariés, aux ouvriers dockers occasionnels et aux salariés d’employeurs installés à l’étranger.

Baisse de 40 % : mesure « reportée »

• Initialement, le projet de décret prévoyait en plus une baisse de 40 % de cette durée lorsque le taux de chômage atteignait 6 % en moyenne au niveau national.
• Cette mesure a été reportée à la prochaine négociation des partenaires sociaux sur les règles d’indemnisation, a annoncé Elisabeth Borne, Première ministre, le 3 janvier 2023.

« Nous avons entendu que ce point pouvait faire l’objet de davantage de discussions. C’est clairement le sens dans lequel nous voulons aller et nous le mettrons dans la concertation pour la définition des règles d’indemnisation que les partenaires sociaux devront négocier fin 2023 », a précisé le ministère du Travail.

Large mécontentement des organisations syndicales

« Le gouvernement s’acharne sur les droits des demandeurs d’emploi » (CFDT)

Dans une déclaration du 24 décembre, la CFDT indique « qu’elle se battra pour que les précaires, les chômeurs de longue durée et notamment les seniors, ne subissent pas cette nouvelle injustice ».

« L’atteinte de l’objectif de plein-emploi passera par des solutions intelligentes sur la qualité de l’emploi et de l’accompagnement des personnes concernées, des solutions de proximité également pour répondre aux multiples facteurs explicatifs du chômage. Certainement pas en s’acharnant sur les seuls droits des demandeurs d’emploi, reflet d’une vision stigmatisante, simpliste et archaïque du fonctionnement du marché du travail. »

« L’exécutif s’assoit sur le paritarisme » (CGT)

« L’exécutif s’assoit sur le paritarisme ignorant, de fait, le rôle des organisations syndicales, passant outre une opposition unanime de celles-ci. Comme à chaque réforme libérale, celle de l’assurance chômage va entraîner plus de précarité pour ceux qui la subissent déjà, notamment les jeunes et les seniors », s’alarme la CGT le 28 décembre 2022, qui appelle à la mobilisation en janvier 2023.

Priver les demandeurs d’emploi de leur droit n’a jamais permis de faciliter le retour à l’emploi, bien au contraire, défendre les conquis de la Sécurité sociale est plus que jamais d’actualité.

« Les plus précaires vont être fortement impactés » (FO)

Ce projet de réforme de l’Assurance chômage a également été condamné par FO dans un communiqué du 28 décembre 2022.

« Une fois de plus, les plus précaires vont être fortement impactés par cette mesure, notamment les saisonniers et les seniors. »

« Ce n’est pas en réduisant la durée des droits et en appauvrissant les demandeurs d’emploi qu’on résoudra la problématique de pénurie de main-d’œuvre, mais en améliorant significativement les conditions de travail des salariés, en augmentant les salaires ainsi qu’en levant les freins périphériques à l’emploi (logement, transport…). »

« Cette réforme est inadmissible » (CFE-CGC)

Interviewé le 26 décembre 2022 sur France-Inter, François Hommeril, président de la CFE-CGC, déplore l’absence de concertation.

« Il n’y a jamais eu de discussion, malgré de nombreuses réunions. C’est un écran de fumée. A la fin, c’est le gouvernement qui décide selon une idéologie très contestable. »

« La réforme ne réglera pas la question du chômage » (CFTC)

Pour Eric Courpotin, secrétaire confédéral CFTC en charge de l’assurance-chômage, qui s’est exprimé le 27 décembre 2022 sur Europe 1, « cette réforme existe avant tout dans une logique budgétaire et vise quelques 4 milliards d’économie, d’après l’UNEDIC ».

« Sortir les demandeurs d’emploi des chiffres, ça n’est pas résorber le chômage. Pire, cette réforme pourrait bien précariser les demandeurs d’emploi et, notamment, les seniors les plus éloignés de l’emploi. Ainsi, certains finiront au RSA. »

« Cette réforme stigmatise une fois de plus les demandeurs d’emploi et les pénalisent » (UNSA)

Laurent Escure, secrétaire général de l’UNSA, condamne ces « nouvelles réductions de droits ».

« Au prétexte de difficultés de recrutement, qui ne leur sont pas imputables, mais à cause de problèmes de formation, d’attractivité des salaires et de conditions de travail, le gouvernement rogne une nouvelle fois les droits à l’indemnisation chômage. »

« Le ministre du Travail affirme qu’il ne touche pas au montant des allocations car il pense au pouvoir d’achat. C’est sans compter sur la baisse de la durée des droits qui impliquera des fins d’indemnisation pour les demandeurs d’emploi n’ayant pas réussi à trouver un poste. Et donc des baisses de revenus plus précoces. »