Assurance chômage : « C’est la réforme de trop » (Martine Froger, députée Liot)
Par Agnès Redon | Le | Syndicats
Lors d’une conférence de presse à l’Assemblée nationale le 21 mai 2024, le groupe « Libertés, indépendants, outre-mer et territoires » (Liot) a présenté sa proposition de loi n° 2550 visant à protéger le modèle d’assurance chômage et soutenir l’emploi des seniors, portée par Martine Froger, députée de l’Ariège, membre du groupe Liot.
À cette occasion, les organisations syndicales ont déclaré s’opposer à la réforme de l’assurance chômage du Gouvernement.
Cette proposition de loi sera examinée le 13 juin 2024 en séance dans le cadre de la journée réservée du groupe Liot, et la semaine précédente en commission.
« Opposition au nouveau tour de vis du Gouvernement »
« Nous nous opposons au durcissement de l’accès à l’assurance chômage », indique Martine Froger, députée de l’Ariège, membre du groupe Liot.
« Le Gouvernement annonce un nouveau tour de vis sur le système de l’assurance chômage. Dans un communiqué publié le 22 avril 2024, le ministère du Travail dit “regretter” l’échec, début avril, des négociations entre les partenaires sociaux sur la vie au travail et l’emploi des seniors, et fixer lui‑même les nouvelles règles d’assurance chômage qui s’appliqueront à partir du 1er juillet 2024.
Ce sera donc la cinquième réforme de l’assurance chômage, dont l’objectif est toujours budgétaire et reste le même : le durcissement des conditions d’accès. C’est la réforme de trop », déclare la députée.
Frédéric Souillot, secrétaire général de Force ouvrière, estime « qu’être au chômage ou au RSA n’est pas un choix. Les trois organisations patronales, ainsi que trois des organisations syndicales représentatives (CFDT, FO, CFTC) étaient parvenues à un accord le 10 novembre 2023 sur de nouvelles règles d’indemnisation. Le Gouvernement ne l’avait pas agréé, mais nous aurions voulu l’agrément de cette convention. Il s’agit encore d’une réforme supplémentaire pour taper sur les plus précaires ».
Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, appelle l’ensemble des groupes parlementaires à voter cette proposition de loi.
Les trois motifs de l’opposition de la CGT à la réforme sont les suivants :
- « Il s’agit de la cinquième réforme de l’assurance chômage depuis 2017, ce qui nous interroge sur le problème qu’a le Gouvernement avec les chômeurs. On ne s’attaque pas à la précarité en s’attaquant aux précaires et on ne s’attaque pas non plus au chômage en s’attaquant aux chômeurs ;
- Le Gouvernement foule au pied sa propre parole puisque, pour justifier ses précédentes réformes, il s’était engagé à un retour à meilleure fortune si la situation économique se dégradait. Or la situation économique se dégrade fortement, selon les chiffres de la Dares qui montrent une augmentation de 15 % des licenciements économiques sur le premier semestre 2024 ;
- Cette réforme est injustifiée sur le plan économique. En effet, les comptes annuels de l’assurance chômage sont au vert. »
Pour François Hommeril, président confédéral de la CFE-CGC, « ce que prépare le Gouvernement est la marque du mépris vis-à-vis des chômeurs, qui ne le sont pas par choix, de leur réalité, mais aussi des partenaires sociaux qui ont toute légitimité pour négocier et avec des résultats positifs. En effet, le résultat de l’assurance chômage a toujours été excédentaire, sauf lorsque l’État s’en est occupé. Plus largement, c’est un mépris pour la France sociale. »
« Une variable d’ajustement budgétaire »
« Nous considérons que le système d’assurance chômage ne peut être envisagé comme le seul instrument de la politique de l’emploi, et encore moins comme une variable d’ajustement budgétaire. Ce Gouvernement doit arrêter d’être fort avec les faibles et faible avec les forts. Il n’a pas le courage de mener des réformes pour que le travail paie plus, alors il décide que le chômage doit moins payer. Nous ne sommes pas dupes et les Français non plus », indique Martine Froger.
Pour Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT : « l’assurance chômage n’est pas une variable d’ajustement budgétaire. Il est temps que le Gouvernement expose les véritables motifs de cette réforme, en particulier dans une démocratie comme la nôtre. »
« Un frein au paritarisme »
Pour Martine Froger, la nouvelle réforme envisagée par le Gouvernement constitue un frein au paritarisme.
« Toutes les organisations s’accordent à dire que ce document de cadrage contraint fortement leurs négociations et explique en partie leurs échecs. Une nouvelle réforme de l’assurance chômage sera donc entérinée par décret de carence d’ici à juillet 2024, alors que les trois précédentes réformes qui se sont succédé n’ont fait l’objet d’aucune évaluation sérieuse. »
Selon Frédéric Souillot, le paritarisme « contribue à la cohésion sociale de la République ».
« Notre attachement au paritarisme n’est pas une question de gestion. Il y a une différence de nature fondamentale entre une assurance chômage gérée par les acteurs sociaux et par l’État. Le patronat a clairement dit que si l’État reprenait le contrôle, il contestera les cotisations sociales et demandera à ce que l’impôt serve à financer cette assurance chômage. Cela la limitera à un simple filet minimum de sécurité, ce qui change la nature des prestations et nous bascule sur un système à la britannique », indique Sophie Binet.
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